La « légende de Drizzt » s’inscrit dans un des univers du jeu de rôles Dungeons & Dragons : les Royaumes Oubliés et décrit les péripéties d’un homme, ou plutôt d’un elfe à la recherche de son « chez lui », d’un havre de paix où il n’aurait plus à fuir pour survivre. Image_2.pngCar Drizzt est un elfe noir, un drow, mais un drow qui a rejeté, renié les préceptes de son peuple. Un peuple d’elfes qui vivent sous terre depuis si longtemps que les véritables raisons de leur bannissement de la surface ont été transcendées, viciées par la rancœur, et la haine envers leurs cousins « féeriques » de la surface qu’ils accusent de tous les maux.

Oui, les elfes noirs sont des créatures du Mal, détestant tout et surtout eux-mêmes. Leur société matriarcale est uniquement basée sur la compétition des Maisons dirigeantes d’où leurs matrones tissent les pires machiavélismes pour s’accorder les bonnes grâces de leur unique divinité : Lolth, la Reine Araignée. Les mâles sont relégués, au mieux, aux arts de la magie ou de la guerre, au pire, à celui de simple reproducteur, alors que les femelles, dès leur naissance, sont éduquées pour devenir des prêtresses de Lolth, seules véritables ayant droit dans leur monde. Rien n’est trop bon pour leur déesse : crimes, châtiments, répressions, massacre d’une maison supérieure dans la société pour s’élever hiérarchiquement. Les cités drows ne tiennent que par cette dévotion fanatique à Lolth et à la poigne de fer des mères matrones.

 

Terre Natale conte l’enfance de Drizzt le dernier né de la maison Do’Urden, et décrit jusque sous ses pires aspects, le fonctionnement de sa cité natale : Menzoberranzan.

Image_3.png
Tout de suite, nous comprenons que Drizzt n’est pas un drow comme les autres. Outre sa peau noire de jais et ses cheveux blancs comme neige, communs à son espèce, ses yeux impressionnent et choquent : au lieu d’être rouges rosés (les elfes noirs sont des créatures des ténèbres, ils évoluent dans le noir grâce à l’infravision, une capacité à détecter les variations de chaleur des êtres vivants, d’où cette couleur d’yeux caractéristique) ses iris sont lavande. Serait-il doué de la double capacité à voir dans le noir comme en plein soleil ?

Ses quarante premières années (un elfe noir vit en moyenne sept cents ans), Drizzt les passe à apprendre l’art du combat à deux armes, deux cimeterres précisément et à prendre la mesure de la décadence de la société dans laquelle il vit. C’est Zaknafein, le maître d’armes de la maison Do’Urden qui lui apprendra les bases de ce style de combat et lui inculquera les préceptes qui feront de lui un peu plus tard « le drow renégat », avant qu’il n’intègre l’académie des guerriers de Menzoberranzan. Là, il se révélera l’élève le plus doué depuis des siècles, attirant bien-sûr la haine et la convoitise de ses comparses.

Mais c’est lors d’une escouade à la surface, qui se révélera être le massacre en règles un petit groupe d’elfes « féeriques », que Drizzt mesurera toute l’étendue de sa propre détresse. Dégoûté, écœuré par l’acharnement de ses semblables à tailler en pièces aussi bien des mâles que des femelles et des enfants, il se retrouva paralysé par tant d’horreur et cette scène eut sur lui le même effet qu’une décharge électrique : il ne lèverait jamais plus ses sabres que par nécessité…

 

Une promesse qu’il aura bien du mal à tenir, car dans Terre d’Exil, Drizzt affronte les dangers de l’Outreterre, le monde souterrain, parallèle obscur du monde lumineux de la surface. En effet, outre diverses intrigues politiques trop longues à décrire ici, « le drow renégat » s’enfuit de Menzoberranzan pour trouver sa place dans le monde.

Image_5.png
Il vivra en chasseur pendant dix ans, laissant souvent la place à son côté sombre lors de batailles avec des monstres de l’Outreterre. Pendant dix années il luttera contre sa double personnalité : celle du tueur sans émotions dans lequel l’académie des guerriers drow a tenté de le transformer, et l’homme bon et juste qu’il tente désespérément de devenir. Dans l’Outreterre il rencontrera des ennemis dont il devra malgré lui souvent se débarrasser à l’aides de ses cimeterres, mais également des amis inattendus : les svirfneblins ou gnomes des profondeurs qui finiront par comprendre qui il est réellement et l’accueilleront dans leur cité, jusqu’à ce que ses premiers et pires ennemis ne réapparaissent : des elfes noirs. Et des drows de sa propre famille, qui ne l’ont pas oublié, et qui pour l’amour de leur déesse araignée, veulent se venger de lui et du déshonneur qu’il a fait tomber sur la maison Do’Urden.

Ce sera son plus dur combat, tant physique que mental. Il y perdra l’espoir qu’un jour il pourra revenir parmi les siens pour leur faire comprendre leurs erreurs et leurs errements suicidaires en suivant les préceptes de Lolth, mais aussi les rares amis qu’il s’était fait, sacrifiés par ses parents.
Désemparé par tant de haine et n’ayant plus que pour seule compagne Guenhwyvar, une panthère magique qui apparaît à sa demande via une petite figurine d’onyx, il n’eu plus d’autres alternatives que de gagner la surface…

 

Mais dans sa quête d’un foyer, d’une Terre Promise, Drizzt devra relever encore de nombreux défis. De par sa nature d’elfe noir, il est chassé à vue et même s’il tente d’approcher une communauté humaine, il n’y rencontre que la peur et de nouveau la haine…

Image_4.png
A cause d’une méprise, il est obligé de fuir ces humains qui le traqueront sans répit, dont un en particulier, Férul McCartilage, qui dans sa folie ne reconnaîtra pas les marques pourtant évidentes de sa volonté de s’intégrer, et le pistera des années durant.

Durant son périple Drizzt rencontrera un nouveau mentor, après le maître d’armes Zaknafein, le vieux rôdeur aveugle Montolio qui lui enseignera la voie de la nature, l’empathie avec les animaux sauvages, le respect de la Création, de la faune et de la flore et lui révélera que le chemin qu’il empruntait, la philosophie de vie qu’il s’était assigné était celui de la déesse Mailikki, la Dame ou Reine de la Forêt. L’incarnation de ses principes, son mode de vie avait désormais un nom, même s’il mit du temps à l’accepter, se souvenant de ce que son peuple était capable au nom d’une divinité.

Mais cette période de tranquillité de dura qu’un temps : Férul McCartilage signa un pacte contre-nature avec le roi orque Graugn pour l’aider à tuer Drizzt. Même si l’attaque du bosquet qui leur servait de lieu de vie pu être repoussée, Montolio succomba durant la bataille.
Drizzt, de nouveau seul avec sa panthère, parti pour l’extrême nord, où il est dit qu’une vallée isolée du monde acceptait tous les renégats du monde pour y recommencer une nouvelle vie. Mais même là encore, la présence d’un elfe noir était mal vu, fusse-t-il renégat…

La trilogie de l’elfe noir sont trois romans magistraux, épiques, sensibles, courts (330 pages en moyenne) mais d’une rare intensité. Merci au label Milady d’avoir eu l’audace de la publier à nouveau, dans une nouvelle traduction intégrale qui rend toute son énergie et sa force évocatrice à l’incroyable épopée d’un anti-héros si touchant dont on espère qu’il trouvera enfin son foyer après des années à devoir lutter pour faire accepter sa différence. Voir le site de Milady : http://www.milady.fr/livres/view/22.